Ceux qui sauront - Pierre Bordage

Auteur : Pierre Bordage
Editeur : J'ai lu
Pages : 318
Prix : 6,70€

Et si la Révolution française n'avait pas eu lieu ? Voici le portrait d'une France qui ne fut jamais, où une minorité d'aristocrates continue, aujourd'hui, d'asservir les masses populaires, notamment en interdisant l'instruction. Jean, fils d'ouvrier, en fait la dure expérience lorsqu'une descente de police met un terme brutal aux cours qu'il suit clandestinement. Incarcéré, puis libéré par la Résistance, il devient un hors-la-loi. Clara, elle, est née du bon côté de la barrière. Pourtant, la vie dorée qu'on lui impose et les inégalités dont souffre son pays la révoltent. Deux personnages, un destin commun : changer le monde...

Des fois, on peut légitimement se demander si ceux qui rédigent le 4eme de couverture savent de quoi parle le bouquin. « Ceux qui sauront » est bien une uchronie mais la divergence historique n’est pas celle indiquée. La révolution française a bien eu lieu, suivie du premier empire, de la restauration, de la monarchie de juillet, du second empire et de la IIIeme république de Jules Ferry. Et c’est la que la divergence historique se situe. Jules Ferry n’eu pas le temps d’instaurer l’école laïque, gratuite et obligatoire puisque son gouvernement fut renversé par les royalistes qui restaurèrent la monarchie. Du coup, l’éducation est réservée à la noblesse et le peuple est volontairement maintenu dans l’ignorance. Plus d’un siècle après, en 2008 exactement, le destin de deux adolescents va se croiser. Jean est un « cou noir ». Son destin est tout tracé. A 14 ans il commence à travailler pour aider sa famille. Clara elle fait partie de la bourgeoisie. Son destin c’est d’épouser le mari que ses parents lui ont choisis. Mais nos deux adolescents ont l’esprit rebelle. Jean veux sortir de sa condition et il apprend à lire en cachette à l’école clandestine. Clara veux briser les traditions et échapper à son destin de future femme d’aristocrate. Alors que tous les oppose, nos deux adolescents vont se rencontrer, unir leur forces, s’aimer et se rebeller contre le système. « Near, far, wherever you are. I believe that the heart does go on... »

L’univers décrit par Bordage est intéressant. Cette France actuelle, organisée comme avant la révolution, où les technologies sont réservées à une élite, est bien décrite et très réaliste. Bordage a eu le bon gout de ne pas trop accabler la noblesse et montre que le régime mis en place ne peut pas marcher sans la complicité d’une partie du peuple, de la bourgeoisie en passant par la police jusqu’aux gangs. Le manichéisme de base est heureusement évité. Et puis il y a certains détails qui m’ont bien amusé comme le R2I (l’Internet uchronique), les délocalisations dans les colonies, ou lorsque Clara découvre que certaines inventions ont été volontairement ignorées par le pouvoir afin d’éviter les rebellions. Ainsi, sans machine à laver, les femmes du peuple n’ont pas le temps de penser à autre chose qu’à leurs taches ménagères. Toutefois on peut quand même regretter que l’auteur reste un peu trop superficiel sur l’aspect critique social. Aussi bien décrite soit elle, cette France royaliste n’est qu’un décor et un public adulte risque d’être frustré de ne pas en savoir plus. Quand à nos héros, Jean et Clara, ils sont malheureusement un poil cliché. Tous les oppose mais, bien sur, ils vont finir par se retrouver parce que l’amour et bien c’est plus fort que toouuuut. De ce point de vue là, c’est zéro surprise malheureusement et cette amourette à la Jack et Rose, pour rester dans la référence de mon intro, aura du mal à passionner un public adulte. Cela dit, si on considère que la cible visé est celle de Twillight c’est plutôt bien foutu

Il faut être honnête et considérer l’œuvre pour ce qu’elle est : un roman jeunesse. Et dans le genre, il faut reconnaitre que ca se situe plutôt dans le haut du panier même si ca n’arrive pas au niveau de ce que peut faire Neil Gaiman par exemple. C’est bien écrit, c’est fluide, le vocabulaire est recherché. La lecture est dynamique grâce à un découpage intelligent des chapitres. Ceux-ci ne sont pas trop longs et alternent régulièrement entre Clara et Jean, laissant à chaque fois nos héros dans une situation périlleuse ce qui pousse le lecteur à vouloir continuer sa lecture. La fin appelle une suite, déjà parue en grand format. Pas sur que je trouve la motivation pour la lire prochainement. Mais en poche, pendant les vacances, pourquoi pas. Finalement, on ne pourra réellement reprocher qu’une chose à ce roman. Celui-ci n’est qu’un bon roman jeunesse et ne dispose pas de ce deuxième niveau de lecture qui aurait pu le rendre plus intéressant pour un public adulte.

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