vendredi 15 avril 2011

Lavinia - Ursula K. Le Guin

Auteur : Ursula K. Le Guin
Editeur : L'atalante
Pages : 311
Prix : 18€

Comme Hélène de Sparte j’ai causé une guerre. La sienne, ce fut en se laissant prendre par les hommes qui la voulaient ; la mienne, en refusant d’être donnée, d’être prise, en choisissant mon homme et mon destin. L’homme était illustre, le destin obscur : un bon équilibre.

Dans l’Énéide, Virgile ne la cite qu’une fois. Jamais il ne lui donne la parole. Prise dans les filets du poète qui n’écrira l’épopée des origines de Rome que des siècles plus tard et sans avoir le temps de l’achever avant sa mort, Lavinia transforme sa condition en destin. De ce qui sera écrit elle fait une vie de son choix. Et cela dans la douceur amère et la passion maîtrisée que suscite son improbable position : elle se veut libre mais tout est dit.

Sensation littéraire de ce début d'année, acclamé par de nombreuses critiques, récompensé du prix Locus du meilleur roman de Fantasy en 2009, Lavinia est un roman que j'ai bien failli abandonner au bout de 50 pages. Librement adapté de l'Éneide, épopée écrite par Virgile et racontant l'histoire d'Énée, héros troyen ayant fuit son pays suite à la chute de Troie et qui après un périple de plusieurs années arriva dans le Latium où il y devient Roi et participa à la fondation de Rome, le roman de Le Guin a la particularité de se placer du point de vue de Lavinia, la femme d'Énée, qui n'est pourtant citée qu'une fois par Virgile. Parce qu'elle refusa d'épouser Turnus, Lavinia, fille de Latinus le Roi des latins, déclencha une guerre entre l'armée d'Énée et le Latium. Mais de cette guerre naquit un royaume fort qui conduira son peuple, les latins, vers la gloire et la puissance.

L'originalité de ce roman est qu'il est raconté du point de vue d'une femme. Ce parti pris fonctionne très bien lorsqu'il s'agit de raconter la vie de cette société antique. La reconstitution qu'en fait Ursula K. Le Guin, tant sur l'organisation des tâches, les rites religieux ou la politique est pleine de vie et de détails qui lui donnent toute sa substance. On sens chez l'auteur une vrai passion pour cette époque, passion qu'elle arrive à faire passer. C'est aussi l'occasion pour l'auteur d'aborder un de ses thèmes de prédilection, le féminisme, et de se pencher plus particulièrement sur la place et le rôle des femmes dans cette société patriarcale. Par contre, pour les scènes de batailles (en gros, toute la première partie du roman) qui sont retranscrites d'après des témoignages, Lavinia n'y assistant pas, cela ne fonctionne pas. C'est plat et sec. Ca manque de vie et de rythme. Il manque ce souffle épique qu'on a l'habitude de trouver dans les grandes batailles de fantasy. Certes le propos de l'auteur n'est sans doute pas là et certains y trouveront peut être leur compte, mais moi ça m'a passablement ennuyé.

Au niveau du style, je ne peux que louer la qualité d'écriture du roman. Ursula K. Le Guin a essayé, avec réussite, de retrouver le style de ces épopées qui l'ont fait rêver. L'écriture est élégante, le style est soigné. Il se dégage de l’œuvre une poésie qui fait son charme. En parlant de poésie, durant tout le récit, Ursula K. Le Guin imagine un dialogue entre Lavinia et son poète qui peut rebuter certains. Si le procédé s'avère assez original et permet de planter le décors de façon astucieuse, j'avoue être assez hermétique à ce genre d'exercice et le début du roman étant principalement composé de cela, j'ai failli ne pas aller plus loin. Heureusement, après une cinquantaine de pages, le récit débute réellement et on vient vers quelque chose de plus classique.

Quoi qu'il en soit, Lavinia est un roman sans aucun doute bourré de qualités mais qui n'est pas pour moi. Il ne m'a véritablement intéressé que dans sa dernière partie, celle se passant après la mort de Turnus. Pour le reste, j'ai eu beaucoup de mal. En matière de batailles et d’épopées, ma préférence va sans conteste à un bon vieux Gemmell, certes moins littéraire mais beaucoup plus amusant. Quand à la poésie. Je l'avoue sans problème, ça n'est pas mon truc. Lavinia est un roman écrit par une femme, sur une femme, pour un public essentiellement féminin. Ça peut paraitre réducteur, mais dans les faits je ne pense pas être loin de la vérité.

CITRIQ

3 commentaires:

Guillaume44 a dit…

Ha ouais, en fait du déjà vu ailleurs à te lire !

Pitivier a dit…

Je ne dirais pas ça. L'histoire est connue mais pour ce livre, la forme a autant d'importance que le fond. C'est juste que ce n'est pas du tout pour moi. Mais en matière de fantasy j'ai des gouts qui ne doivent pas être les tiens. J'aime bien Tolkien, la big commercial fantasy, les chevaliers qui jurent, crachent et pourfendent de l'orc.

Guillaume44 a dit…

Houla moi c'est surtout la high fantasy tolkieno-eddingiste qui me barbe, cela ne m'empêche pas de lorgner sur du warhammer battle de chez Black Library, surtout si on va vers de l'heroic-fantasy, de la sword & sorceress, et tout truc bourrin qui cogne dur. Après c'est certain, si l'auteur veut faire plus original, je l'attends sur le terrain de la fantasy of manners et autres trucs tordus de ce genre.

Non là cela m'évoquait des livres comme Troie ou la trahison des dieux de Bradley M. Zimmer, avec la mise en avant du personnage de Cassandre, moins mis en avant d'habitude. Sauf que là c'est carrément sortir de l'ombre une obscure figurante si j'ai bien compris ? Et comme c'est la femme d'Enée, c'est l'occasion de la tirer de l'ombre de son mari et d'en faire une héroïne féministe antique, enfin c'est ce que je retiens de ta chronique, je n'ai pas trop eu l'occasion de lire ce livre !

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